CHAT de Bové (Le Monde)
José Bové : ="il faut
remettre en cause notre modèle de développement"
LEMONDE.FR | 02.02.07 |
15h43 • Mis à jour le 02.02.07 | 16h05 =
Adrien, étudiant de Tours
: Ne pensez-vous pas que la =multiplication des candidatures de l'extrême
gauche va diviser vos =électeurs et ainsi les chances de parvenir à emporter
les =élections ?
José Bové : Je crois que ma candidature est une
candidature =qui veut être utile à la gauche pour battre Sarkozy et Le Pen.
=C'est une candidature qui s'inscrit dans la dynamique des collectifs
=unitaires et des 125 propositions qui ont été élaborés par =ceux-ci.
Vince : Vous
considérez-vous comme un candidat écologiste ? =
José Bové : Je me considère comme une candidat qui
ne =peut pas séparer la lutte écologique de la lutte contre un =modèle
économique, modèle économique productiviste et =libéral. La crise écologique
aujourd'hui est le fruit d'un =modèle de développement qui s'est accentué par
la logique de la =mondialisation libérale.
Marcie : Comment allez-vous
donner du travail aux Français ? =
José Bové : Il y a plusieurs pistes. D'abord, il
faut que =le travail soit revalorisé par rapport au capital. Il y a 150
=millions d'euros, dans les 10 dernières années, qui sont passés =du travail
vers le capital, c'est-à-dire vers les actionnaires. Il =faut que cet argent
permette de revaloriser les bas salaires et les =minimas sociaux.
Un autre type de mesure, par
exemple : à cause du problème =climatique et de la nécessité de la maitrise de
l'énergie, il =est indispensable de réhabiliter tous les logements qui ont été
=construits avant 1975. Si on réhabilite 400 000 logements par an =pendant 40
ans, cela permettrait de créer au moins 100 000 =emplois.
Banlieue78 : Peux-tu
clairement énoncer ta vision concernant le ="sort" des quartiers
populaires jetés dans l'anathème et la source =de tous les maux de la
République ? Quelle transformation sociale =dans les quartiers populaires ?
José Bové : La question des banlieues ou des
quartiers =populaires est une question centrale tant au point de vue de
l'emploi =que du logement et du respect de toutes les personnes qui y vivent
dans =leurs différences, qu'elles soient culturelles ou sociales. On ne
=réglera pas la question par une simple réunion =interministérielle. Il y a nécessité
de faire avec l'ensemble =des populations de ces quartiers, des élus, des
véritables =états généraux des banlieues.
Et au niveau du Budget de
l'Etat, si on veut sortir de la =ghettoïsation, il faut que cela soit une
priorité.
Benjamin : N'avez-vous
pas l'impression d'être obscurantiste en =arrachant des plants transgéniques
destinés à produire des =médicaments ?
José Bové : Aujourd'hui, la fédération des
=producteurs d'OGM au niveau international a pris une position très =claire en
disant qu'il ne fallait pas utiliser des plants en plein air =pour produire des
médicaments parce que les risques de transferts de =ces gènes à d'autres
plantes pouvaient créer des risques pour =la population qui n'est pas malade.
Deuxième raison : il existe
des méthodes beaucoup plus fiables =pour produire ces molécules en utilisant
les fermenteurs en milieu =confiné. C'est d'ailleurs ce que choisissent les
laboratoires.
Ganz : Serez-vous le
candidat de la "décroissance" ?
José Bové : Dans le projet que nous avons avancé,
nous =avons dit très clairement qu'il fallait remettre en cause le =modèle de
développement dans lequel nous sommes tant au niveau de =la production que de
la consommation et des transports. Cette question =touche à la fois l'avenir du
travail et la pénibilité du =travail, mais aussi l'avenir de la planète et la
possibilité pour =les générations futures de pouvoir vivre de manière décente.
=
Il est certain, que de
toutes les manières, les ressources fossiles =seront épuisées d'ici une
cinquantaine d'années. Il est =nécessaire de mettre en oeuvre les alternatives
dès aujourd'hui =plutôt que d'attendre un conflit lié à la pénurie.
Enrique : Je travaille
dans une centrale nucléaire, quelle est ta =position sur ce thème ? Le rien
nucléaire ?
José Bové : Dans le cadre des collectifs, les
positions =sont divergentes entre ceux qui sont favorables à la poursuite de la
=politique nucléaire de la France et ceux qui prônent la sortie du =nucléaire.
La position que j'ai adoptée est de dire que ce =débat énérgétique ne peut pas
etre simplement réglée =par des experts dans des cabinets ministériels mais
doit faire =l'objet d'un débat public et d'un référendum.
Pour que ce débat puisse se
dérouler de manière sereine, il est =indispensable d'arrêter le chantier de l'EPR
et de décréter un =moratoire sur toute nouvelle construction de centrales
nucléaires en =France.
Seb : Quelle est votre
opinion sur l'Europe et l'avenir de la =constitution européenne ?
José Bové : Je crois qu'il faut être clair. Les
=Français ont voté "non" en mai 2005. Pour nous, il est clair qu'il
=faut proposer un nouveau texte fondateur qui tourne radicalement le dos =au
tout-marché. Nous proposons que, dès la fin du processus =électoral, la France
s'engage à relancer un processus pour la =rédaction d'un nouveau traité qui
devrait prendre toute sa =dimension au moment de la présidence française de
l'UE en =2008.
Erick,_etudiant : Quelle
est votre position par rapport à =l'immigration ?
José Bové : Sans aucune ambiguïté, je suis pour la
=régularisation de tous les sans-papiers. Les immigrés ne sont pas =une menace.
Ils sont une chance.
Oualid : Avez-vous une
idée pour régler le problème du =logement ?
José Bové : Il faut, entre autres, lancer un grand
projet =de construction. En même temps, on ne peut pas accepter que des
=logements vides puissent continuer à le rester en toute impunité. =Il faut
donc rendre effective la réquisition.
Flobé : Quels seraient
les fondements de la 6e République ? =
José Bové : Je parlerai plutôt de première
=République. On ne peut pas se contenter d'un replâtrage de la Ve =République.
Il faut modifier les rapports du pouvoir et des citoyens. =Il faut mettre de
manière très claire un terme au cumul des =mandats, limiter le renouvellement,
permettre aux citoyens de pouvoir =déposer des projets de loi. Il faut mettre
sous contrôle les =élus et rendre possible leur révocation en cas de
contradiction =avec leurs électeurs.
D'autres réformes sont
indispensables, comme le rééquilibrage =des pouvoirs vers l'Assemblée
nationale, la dissolution du Sénat, =et son remplacement par une Assemblée qui
prenne en compte les =citoyens à travers leurs formes organisées dans la
société. =
Voilà quelques projets dans
le cadre d'une refonte de la =Constitution.
Nathalie : Te considères-tu
comme antimilitariste ?
José Bové : Je suis contre la militarisation de la
=société. Depuis plus de 35 ans, je me bats contre la logique de =guerre. Quand
on dit que le pouvoir est au bout du fusil, c'est toujours =le peuple qui est
au bout du canon.
Je pense qu'il y aura
nécessité de s'interroger sur la =nécessité de maintenir ou non l'armement
nucléaire. La France, =contrairement à ses discours apaisants, relance la
course à la =modernisation et à l'augmentation de son arsenal nucléaire. =Nouveaux
missiles, nouveaux sous-marins et simulation sur les bombes =atomiques au
centre mégajoules en Gironde. Ceci est dangereux et =contraire à un esprit de
paix entre les peuples. Et contraire aux =engagements internationaux de la
France.
PD : Etes-vous favorable
au vote des immigrés ?
José Bové : Je suis favorable au droit de vote de
toutes =les personnes résidant dans notre pays, qu'elle fasse partie de la
=communauté européenne ou de tout autre pays d'origine.
A partir du moment ou on
paye les impôts, les taxes, il est =légitime que l'on ait droit de choisir la
façon dont l'argent est =utilisé. C'est un principe élémentaire de démocratie.
Ralph : Votre accolade
avec "l'obscurantiste" Tariq Ramadan au FSE de =2003 a fait couler
beaucoup d'encre. Vous soutient-il dans cette =campagne ? Surtout, êtes-vous
favorable au maintien de la =laïcité comme principe fondamental de notre
République ? =
José Bové : Je l'ai réaffirmé hier : nous sommes
pour =une France laïque, démocratique, féministe, antiraciste et =écologiste.
Le principe de la séparation entre l'Etat et toutes =les formes de religion
doit être un principe fondamental qui ne =mérite aucune concession.
Sur la première partie de la
question, nous n'avons pas le soutien de =M. Ramadan et nous ne l'avons pas
sollicité.
Yo2007 : Que faudrait-il
faire selon vous pour limiter les =délocalisations d'entreprises dans des pays
plus attractifs =économiquement ?
José Bové : La réponse est à plusieurs niveaux. Au
=niveau international et national. Aujourd'hui, il faut refuser la =logique des
transnationales qui se servent des salariés comme facteur =d'ajustement pour
préserver les intérêts des actionnaires.
La majorité des
délocalisations sont le fruit uniquement de jeux =financiers pour des retours
sur investissement rapides.
Il faut donc, au niveau
national, prendre des mesures pour qu'une =entreprise qui décide de délocaliser
soir obligée de créer =sur le territoire national autant d'emplois qu'elle veut
en faire =disparaître. A ce niveau-là, la liberté d'entreprise doit =être
limitée par l'intérêt général.
Julien : Faut-il
promouvoir et protéger les logiciels libres ? =
José Bové : Le combat pour la défense des logiciels
=libre est quelques chose d'aussi important que la défense du droit =pour
utiliser en tant que paysan, ses propres semences. On ne peut pas =accepter le
pouvoir exorbitant des firmes comme Microsoft qui, à =travers leur outil
industriel, imposent leurs produits.
C'est le message que j'ai
donné hier soir à M. Bill Gates que j'ai =croisé dans les locaux de TF1 où
j'étais interwievé. Il n'a =visiblement pas apprécié mes propos.
Mos : Peut-on connaître
votre patrimoine en quelques mots ? =
José Bové : Mon patrimoine : j'ai une maison qui
m'est =revenue à 120 000 euros et pour laquelle j'ai emprunté 90 000 =euros.
J'ai, avec ma compagne, un petit bateau, qui nous a couté 30 =000 euros. Et
pour me déplacer, j'ai une Clio.
Zaza : Quelle est votre
stratégie d'alliance pour les =législatives ? Avec le PS, le PC, la LCR ?
José Bové : Dans le cadre des collectifs unitaires,
nous =envisageons de présenter des candidats dans un maximum de
=circonscription. Nous verrons si une dynamique unitaire, comme nous la
=souhaitons toujours, y compris pour les présidentielles, pourra se =développer
aux législatives.
Yann._R : Etes-vous pour
ou contre le mariage homosexuel ?
José Bové : Je suis favorable au mariage homosexuel.
Il n'y =a pas de raison de faire de ségrégation en amour...
Ketq : Seriez-vous pour
une dépénalisation de la culture =personnelle du cannabis pour les majeurs ?
José Bové : On est dans une situation tout à fait
=hypocrite dans ce pays. On sait qu'une grande majorité de jeunes =adultes
fument du cannabis et que de nombreux en font pousser pour leur =propre
consommation. Il est donc ridicule de criminaliser une pratique =qui,
aujourd'hui, ne s'inscrit pas dans une logique qui soit contraire =au bon
fonctionnement de la société.
Miguel : Quel est
l'objectif en pourcentage que vous vous donnez au =premier tour ?
José Bové : Pour moi, ce qui est important, c'est
qu'on =fasse le pourcentage le plus élevé possible. Je ne me présente =pas dans
l'objectif de me satisfaire d'un sondage le plus limité =possible. Ce qui est
important, c'est que les thèmes que nous portons =soient présents de toutes les
manières dans le débat et qu'il =puisse ensuite se concrétiser après les
présidentielles et les =législatives.
Merci aux internautes qui
ont bien voulu me poser des questions et en =espérant que mes réponses ont
permis de les éclairer un peu =plus.